La dépression constitue un problème préoccupant de santé publique.
Selon une enquête réalisée en 2005 par l’Inpes(Institut national de prévention et d’éducation pour la santé), 8 % des Français de 15 à 75 ans, soit près de 3 millions de personnes, ont vécu une dépression au cours des douze mois précédant l’enquête.

Elle atteint plus les femmes que les hommes, à tout âge, et multiplie par 30 le risque de suicide. La dépression est ainsi la première cause de suicide : près de 70 % des personnes qui décèdent par suicide souffraient d’une dépression, le plus souvent non diagnostiquée ou non traitée.

1. Dépression/déprime/troubles anxieux

Pour beaucoup de gens, dépression rime avec « déprime » mais pourtant il s’agit de 2 choses bien différentes.
La « déprime » ou « coup de blues » est un sentiment que chacun d’entre nous éprouve dans sa vie lorsqu’il fait face à une situation difficile: maladie, décès, rupture affective, perte d’emploi… Allah nous dit dans le Coran:

« Ainsi faisons-Nous alterner les jours(tantôt bons et tantôt mauvais) parmi les gens » S3V140

Cet épisode de « déprime » dure quelques heures voire quelques jours puis l’on se ressaisit.

La dépression, ou plus justement, « l’épisode dépressif caractérisé » prend des proportions plus grandes et affecte l’individu d’une manière que seuls ceux qui l’ont vécu peuvent décrire.
Les 2 principales caractéristiques sont:

– une tristesse intense marquée par des pleurs spontanés et difficilement contrôlables. Cet état est mêlé à un sentiment d’angoisse et de fatalité que rien n’apaise.
– une perte de plaisir et d’intérêt pour des activités qui nous étaient agréables.
Cet état doit durer presque tous les jours durant au moins 15 jours consécutifs avant d’évoquer un épisode dépressif.

Il s’accompagne, par ailleurs, de toute une batterie de symptômes qui reflètent un ralentissement général tant physique que psychologique:

– une fatigue permanente, même sans avoir fait d’efforts particuliers, que ni le repos ni le sommeil n’atténuent.
– la dépression ralentit tous les gestes, il faut donc plus de temps pour accomplir les tâches habituelles. Les mouvements du visage sont diminués, la parole est lente, traînante.
– le patient dépressif est hésitant et indécis, les émotions, les pensées et les actions sont comme « engluées » par la maladie.
– une perte de confiance en soi et de l’estime de soi-même ce qui explique que la seule volonté ne suffit plus pour avancer.
– une culpabilisation excessive avec des idées noires, des pensées de mort et des idées suicidaires.
– une perturbation du sommeil: difficulté d’endormissement, réveil précoce avec sentiment de ne pas avoir « terminé sa nuit…
– des troubles alimentaires: amaigrissement ou prise de poids significatif(>5% du poids).

D’autres symptômes sont également décrits mais pas spécifiques de la dépression.

Ces autres signes sont le témoin d’une anxiété et peuvent aussi se voir dans d’autres maladies regroupées sous le nom de troubles anxieux: trouble anxieux généralisé, trouble panique, phobie, obsession, état de stress post traumatique. Dans la population générale âgée de 18 à 65 ans, l’ensemble de ces troubles anxieux a une prévalence sur 12 mois d’environ 15 % ce qui signifie que près de 6 millions de personnes en France rapportent la survenue d’une maladie anxieuse durant l’année précédant ce recensement(données tirées de la Haute autorité de santé, 2007).

Ces différentes maladies anxieuses ont la particularité de s’articuler autour d’une source de stress, de peur ou d’angoisse mais il n’y a pas de perte d’énergie, de tristesse intense comme dans la dépression. Cependant ces troubles anxieux peuvent entraîner une dépression s’ils ne sont pas traités. Le diagnostic de trouble anxieux est évoqué lorsque il existe des signes d’anxiété durant plus de 1 an avec un retentissement sur les activités de la vie quotidienne.

Parmi ces signes d’anxiété, on note:

– des douleurs et courbatures musculaires, secousses cloniques(=petites contractions musculaires non contrôlées, paupières,joues…), grincements des dents, voix mal assurée.
– vision brouillée, bouffées de chaleur ou de froid, sensations de faiblesse, sensations de picotements.
– palpitations, douleurs dans la poitrine, battement des vaisseaux(cou par exemple).
– soupirs, sensations d’étouffement.
– sensations de brûlure ou de creux à l’estomac, ballonnement, nausées, vomissements, difficultés pour avaler.
– envie d’uriner fréquente, perturbation du cycle menstruel(métrorragies, ménorragies).
– bouche sèche, accès de rougeur, pâleur, vertiges, tendance à suer, maux de tête.

Cependant, tous ces symptômes peuvent être en rapport avec une pathologie organique(ulcère, hypertension, maladie du rythme cardiaque…), il convient donc de consulter son médecin traitant lorsque ces symptômes sont récidivant et qu’ils ne peuvent s’expliquer par la seule anxiété. Gardons en tête « qu’un train peut en cacher un autre ».

2. Cas particuliers

Certaines situations ainsi que certaines catégories de population présentent des particularités:

– la femme enceinte : l’épisode dépressif après l’accouchement ne doit pas être confondu avec le baby blues .
Ce dernier est un moment de doute passager, facilement surmontable, qui se caractérise par le sentiment d’être débordé, de ne pas comprendre les demandes du bébé. Il se manifeste chez de nombreuses femmes (près de 50%) quelques jours après l’accouchement.
L’épisode dépressif du post-partum est, quant à lui, une véritable dépression qui répond à tous les critères de la maladie et qui débute dans le mois qui suit l’accouchement.

– en cas de deuil : au cours des semaines qui suivent, il est courant de ressentir des symptômes dépressifs liés au deuil. Mais si les symptômes persistent sur une longue période (>2 mois) ou sont très intenses, il est alors nécessaire de consulter son médecin traitant afin de mettre en place un suivi psychologique.

– les enfants et les adolescents :certains symptômes dépressifs peuvent être spécifiques à ces tranches d’âge.
En effet, la dépression peut se manifester à travers des comportements de retrait, d’absence ou, à l’opposé, d’irritabilité, d’agitation, de violence verbale. La dépression peut aussi se manifester par des comportements nuisibles pour la santé : tabac, alcool, drogues, abus de médicaments.

– les personnes âgées : les symptômes sont similaires mais la reconnaissance de la maladie peut être plus difficile à faire, en raison de la diminution de l’activité physique et parfois intellectuelle. Pourtant, le fait d’être triste ou pessimiste ne doit pas être considéré comme normal lorsque l’on est âgé.

3. Ses conséquences

– Le patient dépressif a parfois recours à des conduites addictives: tabac, cannabis, ecstasy, alcool à travers lesquelles, il cherche à apaiser son anxiété. En plus d’être nuisibles pour la santé et interdites en Islam, je le précise car certains de nos frères et soeurs malades ont recours à ces substances, ces conduites peuvent aussi être un frein à la guérison de par la dépendance qu’elles entraînent.

– L’autre conséquence des troubles anxieux et plus particulièrement de la dépression est de provoquer une exclusion sociale.
Il devient de plus en plus difficile de côtoyer ses proches: sa famille, ses amis, le monde en générale. Cette mise à l’écart est due à l’impression d’abandon, d’inutilité et de solitude : ces impressions cohabitent avec le sentiment de « ne pas être aimé des autres », « de n’avoir rien à dire qui puisse les intéresser ».
Cet isolement est aussi lié à l’incompréhension et parfois à la moquerie que subissent ces patients. Certains ont tendance à minimiser l’impact de ces maladies sur les intéressés: « penses à autre chose, ça passera », « toujours triste celui-là », « il va nous rendre fou à force de rester avec lui », « faut pas en faire toute une histoire »…Ce sont des paroles que j’ai déjà entendu et qui révèle le manque d’empathie(=art de se mettre à la place d’autrui) entre nous. Allah n’a-t-il pas dit:

« Les croyants sont des frères, établissez donc la concorde entre vos frères et craignez Allah afin que l’on vous fasse miséricorde » S49V10

– La complication la plus redoutée: la crise suicidaire.
« Il s’agit d’une période critique, marquée par un envahissement des émotions, par de grandes difficultés pour se concentrer et par le sentiment profond d’avoir tout essayé et que rien ne marche pour être soulagé. Le vécu d’impuissance est majeur. Cette crise suit souvent un processus qui comporte plusieurs étapes: la personne a d’abord des « flashs » (visions brèves qui donnent l’impression de devenir fou), puis des idées de suicide plus ou moins fréquentes et intenses contre lesquelles elle va lutter mais qui peuvent éventuellement l’envahir ; elle risque alors de passer aux stades de l’intention (prise de décision), de la planification (recherche du moyen, du lieu, des circonstances et du moment) et de la mise en œuvre de son suicide. » Cette description de la crise suicidaire a été obtenue par les témoignages de malades dépressifs et recueillis par l’Anpes.

A cet effet, un site informatif, complet et ludique a été élaboré afin de sensibiliser sur la dépression et que je vous invite à consulter: www.info-depression.fr

Si de telles idées traversent votre esprit, sachez qu’il est urgent d’en parler à un professionnel de santé. Rappelons aussi qu’il est possible de se rendre aux urgences de l’hôpital le plus proche.

4. Les traitements

4.1 L’hygiène de vie

La bonne hygiène de vie aide à prévenir la survenue d’un état anxieux ou d’une dépression mais elle permet aussi d’en diminuer les symptômes:
– pratiquer une activité physique régulière
– préserver son sommeil
– assurer une alimentation équilibrée et adaptée aux besoins
– s’éloigner de toute conduite addictive: alcool, tabac, cannabis…

4.2 La psychothérapie

Dans les troubles anxieux et les formes précoces de la dépression, la psychothérapie joue un rôle primordiale.

En décortiquant le ou les éléments anxiogènes(=responsables de l’anxiété), par son soutien psychologique, son écoute attentive, ses conseils pratiques mais aussi par des psychothérapies plus structurées: self help(=autogestion du stress), technique de relaxation(respiratoire, gestion des émotions…), thérapie comportementale…le psychothérapeute, bien formé et entraîné, a un rôle essentiel dans le parcours de soin.

Parce que la connaissance et la compréhension des particularités culturelles et religieuses des patients sont importants dans la démarche de soin, le psychothérapeute doit naturellement être instruit de ce savoir.

Je rappelle que les consultations de psychologues et psychothérapeutes ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale.

4.3 Les traitements médicamenteux

– Le traitement de première intention reste les anti-dépresseurs qui ont un effet anxiolytiques(=anti stress) et surtout stimulent l’humeur. Lorsqu’ils sont prescrits assez tôt dans la maladie +/- associé à une psychothérapie, les résultats sont satisfaisants. Ils ne provoquent pas de dépendance.

Leurs effets secondaires: prise de poids, trouble du sommeil, nausée sont tolérables à la condition de maintenir une bonne hygiène de vie. L’autre effet secondaire est le rebond d’anxiété dans les premiers jours de traitement ce qui rend nécessaire un suivi régulier toutes les semaines ou toutes les 2 semaines pendant le premier mois. Le traitement est ensuite réévalué au bout de 6 semaines environs et devra être maintenu 6 mois à 1 an après guérison pour éviter les rechutes.

– les anxiolytiques d’action rapide permettent de diminuer les symptômes lorsqu’ils sont envahissant ou de calmer rapidement une crise anxieuse ou une attaque de panique. Les benzodiazépines sont les molécules les plus prescrites.
Leur principal effet secondaire est la dépendance qu’ils provoquent. Afin d’y remédier, leur utilisation ne doit pas dépasser 12 semaines et ils doivent être diminués progressivement.

On comprend alors que ce traitement n’est pas une solution au long terme mais il doit seulement permettre au malade de suivre son parcours de soin(psychothérapeute, anti-dépresseur) avec plus de sérénité.
J’insiste là dessus, beaucoup de personnes ont un usage abusif de ces médicaments, on les voit alors victimes de perte de mémoire, de confusion voire de chute(surtout chez la personne âgée) et surtout ils deviennent dépendants.
Lorsqu’une substance provoque une altération de l’esprit et une dépendance, elle devient interdite en Islam.

Gardons en tête ce hadith d’Abdullah ibn Omar (qu’Allah soit satisfait de lui) dans le Sahih de Muslim(n°3733), le messager d’Allah(prières et salutations d’Allah sur lui) a dit:

« Toute substance enivrante(qui altère l’esprit) est du -khamr- et tout -khamr- est interdit »

4.4 La médecine prophétique

– Nous pouvons citer le Talbina, il s’agit d’une préparation à base de farine d’orge(idéalement de production traditionnelle), de lait et de miel.
A ce sujet, d’après ‘Urwa, Aicha(qu’Allah soit satisfait d’elle) ordonnait la Talbina pour le malade et pour la personne affligée d’un deuil récent. J’ai, disait-elle, entendu le messager d’Allah(prières et salutations d’Allah sur lui) dire ceci :

« La Talbîna réconforte le coeur du malade et dissipe un peu le chagrin. »

Sahih al boukhari n°5689, voir également les n°5417 et 5690.

Des études scientifiques ont démontré ses bienfaits et sont parues dans de grandes revues comme « the American Journal of Clinical Nutrition » et « Archives of Internal Medicine ». Parmi ceux-ci, il est démontré que la Talbina est une source de tryptophan, c’est un acide aminé qui est à l’origine de la sérotonine. La sérotonine est une substance qui améliore l’humeur, elle est la cible principale des médicaments anti dépresseurs.

L’ingrédient principal de la talbina, la farine d’orge d’élaboration artisanale, est sensible à l’humidité et donc présente un haut risque de moisissure, risque d’autant plus élevé que le produit est importé et qu’il n’est pas été soumis à une validation phytosanitaire. Prenez garde donc à vous approvisionner auprès de vendeur peu scrupuleux. Je vous conseille ainsi, la société Mujezat Al Shifa Europe qui travaille en collaboration avec les services phytosanitaires de Roissy ainsi que ses services douaniers.
Ses allégations de santé ont, par ailleurs, été élaborées avec l’aide d’un inspecteur de la DGCCRF(direction générale du commerce, de la concurrence et de la répression des fraudes).

La talbina est intéressante dans les états d’anxiété passagère et aussi comme complément alimentaire lorsque la pathologie anxieuse gène l’alimentation.

– La hijama ou cupping thérapy est aussi une thérapeutique complémentaire, elle permet de relaxer, d’améliorer le sommeil et d’aider au traitement d’autres symptômes liés à l’anxiété: courbature, mal de tête…
L’acupuncture a également été validée dans le traitement complémentaire de la dépression(recommandation de l’Organisation mondiale de la santé de 2003) mais elle présente des risques de transmission de maladies par l’utilisation des aiguilles (sauf celles à usage unique).
A ce sujet, une étude publiée dans le « Journal of Biomechanics » en 2005, affirme: « la cupping therapy s’est avérée être une alternative thérapeutique à l’acupuncture en permettant d’utiliser ces mêmes points d’acupuncture avec un avantage majeur qui est l’absence de pénétration de la peau évitant le risque d’une transmission de maladie. »

L’autre avantage et non des moindres, il s’agit de la recommandation de notre prophète(prières et salutations d’Allah sur lui) dans le Sahih de Boukhari et de Muslim, d’après Anas(qu’Allah soit satisfait de lui):

« Parmi les meilleurs moyens de vous guérir, il y a la Hijama »

Cette première partie s’achève, nous verrons dans le prochain article quelle(s) solution(s) apporte notre foi et quelle est la place des maladies anxio-dépressives en Islam.

Sources:
Haute autorité de santé(HAS), « troubles anxieux graves », juin 2007
Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé(Anaes), « Prise en charge d’un épisode dépressif de l’adulte en ambulatoire », mai 2002
Institut national de prévention et d’éducation pour la santé(Inpes), info-dépression.fr